16/09/2012

La Question Kurde reste toujours actuelle


          En Turquie ceux sont les problèmes autour de la question kurde qui constituent l’ordre du jour. Cette question est au cœur des enjeux politiques et stratégiques du pays. Ainsi elle est présente au cœur du débat identitaire dans ce pays.
La situation actuelle en Turquie ne prête pas une sortie démocratique rapide de l’impasse constituée par la question kurde. Depuis 3 dernières années, surtout depuis les élections législatives du 12 juin 2011, le gouvernement de l’AKP durci de plus en plus sa position à l’égard des efforts en faveur d’une solution politique de la question kurde.
Ces derniers mois, les affrontements entre l'armée turque et la guérilla kurde ont fait des dizains de morts, soit côté de la guérilla soit côté des militaires. Depuis le début du mois de Juillet les forces armées turques ont lancé quelques centaines d’opérations  contre les militants du PKK. Le but de ces opérations est d'écraser la force du PKK qui intensifie les attaques contre les bases militaires. La Turquie mène ces opérations avec la participation des milliers de soldats y comprit l'appui d'hélicoptères et d'avions de guerre. De mêmes opérations sont menées parfois en territoire de la région kurde irakienne. Ces derniers jours de violents combats se concentrent dans les districts de Semdinli et Beytusebap.
Le pouvoir de l’AKP engage contre les Kurdes une lourde répression. Les arrestations contre les politiques kurdes, surtout membres du BDP, deviennent quotidiens. Les procès des avocats, des représentants de diverses associations, des défenseurs des droits humains, des journalistes, des syndicalistes, des étudiants, des intellectuels ainsi que des élus locaux, est une véritable atteinte à la démocratie. On compte à ce jour plus de 6000 détenus dans les prisons turques, arrêtés et jugés pour appartenance à une organisation clandestine (KCK- Union des Communautés du Kurdistan-). C’est donc une répression renforcée sur les militants kurdes, par laquelle tout le peuple kurde est  menacé. L’escalade de la répression et de la militarisation est devenue la règle.
Je me demande si vraiment les responsables européens poursuivent ceux qui se passent en Turquie actuellement ?
Je me permets de rappeler que les années avant et après 1980, la démocratie en Turquie n’était pas une préoccupation pour les pays occidentaux, qui ont réagit favorablement au coup d’Etat. Pour ces pays la priorité était alors de garantir seulement la stabilité de la Turquie dans un contexte de guerre froide.
La perspective européenne apparaît-elle toujours comme une possibilité de sortie de l’impasse pour les Kurdes ? Oui, je pense une forme de reconnaissance des différents groupes ethniques au sein de la République de Turquie permettrait l’approfondissement et la stabilisation de la démocratie qui peut être considérée dans le cadre des termes européens. Il faut souligner que les Kurdes sont d’ailleurs favorables à la perspective européenne concernant la Turquie.
D’après ce que je voie, la perspective européenne concernant la Turquie est actuellement bloquée. Il est toutefois impératif de la maintenir car elle peut représenter toujours un possible sorti de l’impasse actuelle. La non-résolution, par la voie politique et démocratique, de la question kurde en Turquie peut tuer le modèle turc, même si celui-ci doit évoluer. D’autant que la tentation d’internationaliser ou de régionaliser davantage la question kurde représente un fort danger.
Tous les dérapages sont ainsi possibles, c’est pourquoi il est impératif de ne pas céder aux potentielles tentations sécessionnistes qui existent en Turquie et qui, aggraveraient les problèmes plutôt qu’elles ne contribueraient à les résoudre.
Il est impératif que l’Union européenne réagisse contre cette continuité de la situation de guerre. Si cette situation continue et approfondit plus les blessures existantes l’UE aura aussi de véritables pertes. Donc il est important de ne pas rester silencieux.
Ahmet DERE  /  15.09.2012

30/05/2012

Le Président Hollande face à la question kurde

Au cours des 2 dernières décennies du 20ème siècle, la France a toujours tenu une place importante chez des Kurdes. Après le coup d’état de 12 septembre 1980, une partie des Kurdes, qui s'est enfuie de son pays, est venue se réfugier en France. Le grand artiste kurde Yilmaz Güney fait partie des ces premiers Kurdes qui y  ont trouvé refuge. Ce grand artiste kurde et le grand chanteur kurde Ahmet Kaya reposent à Paris, au cimetière de Père Lachaise.
Avec l’arrivée des réfugiés politique kurdes, au début des années 1980, les activités culturelles kurdes se sont multipliées au grand jour  et ce malgré les contestations de la Turquie. En 1982, avec le soutien du Parti Socialiste (PS), l’Institut Kurde de Paris a été créé et il fut une des premières institutions kurdes en Europe. La première conférence, à laquelle les élus d’origine kurde de Turquie ont participé, fut aussi organisée en France, le 29 avril 1989, avec le soutien précieux de Madame Danielle Mitterrand.
Dans ce soutien français aux Kurdes, il est important de souligner le rôle du Parti Socialiste dont, l'actuel président François Hollande était un des des dirigeants.
Après le changement du pouvoir en France, surtout après 1995, de vastes opérations policières ont commencées contre les Kurdes. Entre 1995 et 2012 une centaine de dirigeants des associations culturelles kurdes a été arrêtée dans différentes villes de France. Plusieurs Associations culturelles kurdes et des institutions d’informations ont été interdites.
Depuis l'année 2000 la diplomatie turque a intensifié ses efforts auprès des autorités françaises dans un cadre dit «juridique». Les efforts de la Turquie se sont multipliés surtout après le début des négociations avec l’UE. Sous prétexte de collaborer sur un plan juridique, les autorités turques ont utilisé tous leurs moyens diplomatiques afin de pousser la France, alors gouvernée par l’Union pour un Mouvement Populaire (UMP),  à adopter une position ferme contre les Kurdes et leur combat pour la liberté.
L’approche du gouvernement français a été assez paradoxale en ce qui concerne l’adhésion de la Turquie à l'Union européenne. D’une part, il se déclarait opposé à cette adhésion, d’autre part il donnait  un coup de main à ce pays dans sa lutte injuste contre le peuple kurde. Or il est évident que, si la question kurde n’est pas résolue, la Turquie ne pourra pas prétendre avoir réalisé des progrès démocratiques suffisants selon les critères de l'Union européenne. On peut en conclure que la politique française dans cette affaire, consiste à accomplir un geste vis-à-vis de la Turquie pour éviter une tension qui serait préjudiciable aux les relations économiques que la France entretient avec ce pays.
Un pays comme la France, et notamment avec un gouvernement socialiste, peut jouer un rôle important en ce qui concerne la résolution de la question kurde. Ce pays, où résident des intellectuels et des organisations de la diaspora kurde,  peut peser pour une approche plus conforme aux droits des peuples. Dans ce pays et au sein du PS, s plusieurs hommes politiques  connaissent bien la question et pourraient user de leur force de conviction pour que  la Turquie et les Kurdes se rassemblent autour d’une table pour trouver une résolution commune.
Ce rôle que j'évoque  pour la France et son président socialiste renforcerait ainsi la position européenne vis-à-vis des forces internationales. Nous avons appris de l’histoire que, pour être reconnu sur la scène internationale, il faut  reconnaître au Moyen Orient toute sa place. La force qui ne respecterait pas cette région importante du monde, n’a guère chance d’être efficace dans les autres régions de notre continent.
Aujourd’hui, les Kurdes constituent un groupe  considérable qui se développe de plus en plus au Moyen Orient. La diaspora kurde dispersée dans le monde renforce cette position des Kurdes.
Je pense que le Président de la République Française, monsieur François Hollande, peut  jouer un rôle considérable en ce sens sans oublier que la plupart des Kurdes a  confiance sur les  positions de la formation politique socialiste française.
Ahmet DERE / 29.05.2012

14/05/2012

Les Kurdes de Syrie et leur avenir

Les Kurdes de Syrie représentent environ 11% (plus de 2.2 million) de la population du pays. Ils vivent pour la plupart dans l'est, région la plus riche en pétrole et dans le nord-est vers la frontière de la Turquie. Plusieurs quartiers des villes comme Damas et Alep sont aussi dominés par les Kurdes.

En Syrie, depuis la création de la république en 1946, les Kurdes sont toujours victimes d'une politique discriminatoire. Aujourd’hui encore il y’a des dizains de milliers de Kurdes qui n’ont pas de pièce d’identité et ceux n’ont pas le droits d’avoir la propriété, leurs enfants ne peuvent pas aller à l’école.

Depuis des décennies ces Kurdes de Syrie réclament la reconnaissance de leur langue, de leur culture et ils veulent être traités comme des citoyens à part entière. Parmi les revendications des Kurdes il y’a aussi la reconnaissance des droits politiques et administratifs.

Depuis 1990 les Kurdes sont dans un processus historique pour leur avenir dans la région. Après la guerre du Golf, en 1991, la partie du Kurdistan Irakien a été placé sous contrôle des Nations Unies et après la chute du régime de Saddam Hussein elle a eu son autonomie régionale dans le cadre des frontières d’Irak. Cette partie du Kurdistan gagne une importance de patrie nationale pour tous les Kurdes. Comme nous le savons tous, avec la lutte menée par le PKK et celle des autres organisations kurdes, en Turquie certains droits sont reconnues pour la population kurde vivant dans les frontières officielles de ce pays. Malgré cela, il y’a encore un long chemin à parcourir afin d’avoir une bonne reconnaissance des droits culturelles et politiques des Kurdes en Turquie.

Maintenant c’est le tour des Kurdes de Syrie à avoir la reconnaissance de leurs droits. Ces Kurdes luttent depuis une trentaine d’années, ils ont joué un rôle important dans le processus du progrès de la lutte menée par le PKK. C’est pourquoi le Parti de l’Union Démocratique (PYD) (Le parti qui représente la moitié des Kurdes en Syrie) est soutenu par le PKK.

Au-delà de l'urgence humanitaire, la chute du régime baasiste est donc devenue pour Ankara un enjeu sécuritaire. A cause du lien étroit entre le PYD et le PKK, les autorités turques ne veulent pas laisser une reconnaissance officielle du PYD dans le rang de l’opposition syrienne. Selon les dirigeants de l’opposition syrienne, accorder trop de droits aux Kurdes risquerait de déplaire à la Turquie. Donc, il est difficile de prédire comment se terminera ce bras de fer, mais une chose est sûre: la position des Kurdes de Syrie, comme ce fut le cas en Irak, n'en sera que renforcée désormais.

Après le « cessez-le-feu », déclaré suite à l’intervention des Nations Unies, entre les forces de sécurités syriennes et la rébellion, les forces paramilitaires se sont retournées vers les Kurdes. Le 10 mai dernier, dans une attaque des ces forces  paramilitaires contre un cartier des Kurdes à Alep, au moins 8 personnes ont été tuées et 30 autres blessées. Il parait que le régime baasiste ne laissera pas tranquille les Kurdes et réorganisera de même attaques.

Mais, malgré tout, les dirigeants kurdes de Syrie croient qu’un système fédéral, leur garantissant la citoyenneté, le droit de propriété, un système éducatif en langue kurde et une répartition équitable des recettes budgétaires peut être une solution pour la question kurde.

Malgré que le conseil national syrien a promis déjà, si le régime de Bachar el-Assad est renversé, d'instituer un conseil présidentiel à la tête du pays et d'accorder aux Kurdes un gouvernement autonome et une reconnaissance de son identité les Kurdes ne peuvent pas y croire. Car, dans les rangs de l'opposition syrienne il y’a aussi une distance envers les Kurdes. Certains d’entre eux ne cachent pas leurs craintes de voir les revendications des Kurdes déboucher sur une tentation sécessionniste. Ainsi, nous savons que la Turquie est derrière de ce conseil et elle ne veut pas que les Kurdes de Syrie aient les mêmes droits que ceux d’Irak. Les autorités turques craignent que le même droit puisse être revendiqué par les Kurdes au Nord du Kurdistan (Kurdistan de Turquie).

Malgré que, depuis le commencement des soulèvements populaires, le PYD a pris une position proche du régime de Bachar el-Assad, et que je trouve cela comme une faute stratégique, il n’y a aucune autre solution, soit pour l’opposition soit pour la Turquie, les Etats Unies et l’UE, de connaitre le PYD comme une force importante parmi les organisations des Kurdes de Syrie. Et une solution sur la base d’une autonomie régionale des Kurdes est indispensable dans ce pays.  
 
 
Ahmet DERE / 14.05.2012
Journaliste / Ecrivain 

11/01/2012

Persécution contre les Kurdes ne cesse pas

Malgré les discours et messages des autorités turques en faveur d’une « ouverture démocratique », la politique de persécution contre les Kurdes ne cesse pas. Le 28 décembre dernier 35 villageois kurdes ont été tués par les raids aériens de l’armée turque, sur la frontière entre le Kurdistan de Turquie et la région autonome du Kurdistan irakienne. Selon des témoins, quatre avions de chasse du type F-16 ont bombardé  ces villageois, parmi lesquels figurent des enfants et des jeunes, âgés 12 à 18 ans.
Il faut souligner que ce raid est intervenu quelques heures après la réunion du Conseil de Sécurité Nationale, tenue le même jour à Ankara. Dans de ce genre de réunion on discute la politique concernant les mesures à prendre contre la lutte de la liberté pour les Kurdes.
Ce massacre peut être une nouvelle ère dans la conduite de la politique turque en ce qui concerne les Kurdes. Ainsi, cela peut être un départ du commencement d’un nouvel épisode des opérations meurtrières déclenchées par le gouvernement et son armée. Sous ce nouveau régime des milliers de politiques et intellectuels kurdes, parmi lesquels se trouvent aussi des journalistes, passent leur temps derrière les barreaux des prisons, simplement pour avoir revendiqué les droits et les libertés du peuple kurde.
Aujourd’hui la plupart des médias écrits et audio-visuels turcs est sous le contrôle du régime. C’est pourquoi, les médias turcs ont essayé d’éviter de parler de ce massacre, pendant toute la journée du 28 décembre. Avec cette force médiatique, le gouvernement d’AKP compte de briser toute sorte de lutte pour la reconnaissance des droits du peuple kurde. La politique du régime fait ignorer toutes sortes de violations des droits de l'homme, pas seulement au Kurdistan, mais aussi par tout en Turquie.
Malheureusement, malgré cette situation bien claire, le gouvernement d’AKP continue à donner des leçons de démocratie aux pays arabes, en leur demandant d’engager des réformes démocratiques et  mettre fin à la répression menée contre leur population. Vu la situation en Turquie et au Kurdistan, est-ce que ceci n’est pas une hypocrisie étatique ?
Contre cette répression de l’état turc, les dirigeants des pays occidentaux insistent toujours à garder leur silence. Est-ce qu’il n’est pas urgent et important de réagir vite, aux niveaux internationaux, afin de mettre fin à cette situation dans laquelle se trouvent les Kurdes ?
Il est le temps pour les dirigeants européens de ne rester plus comme complices d'Ankara, il faut qu’ils prennent de positions fermes dans toutes les instances contre les violations des droits de l'homme commis en Turquie et au Kurdistan. Avec cette réalité, comment est ce que la Turquie peut être traitée comme un pays candidat à l'Union européenne ? Comment l’UE peut continuer à négocier le sujet d’adhésion de la Turquie ? Cette position de l’UE encourage les dirigeants turcs de pousser le pays dans le chaos. Est-ce que l’intervenir sur le débat démocratique en Turquie n’est pas une obligation de l’UE, à partir du moment où cette dernière a mis à son agenda le sujet de l’adhésion de la Turquie dans l’Union ?
Selon les chiffres des organisations de défense des droits de l’homme, depuis 2009, plus de 7700 personnes ont été mises en garde à vue au prétendu motif qu’elles auraient été membres du KCK (Union des Communautés du Kurdistan).
Il est bien claire que la Turquie a déclaré une « guerre totale » au peuple kurde et ceci dans un silence international. Les arrestations des dirigeants kurdes se multiplient chaque jour. Aujourd’hui il y a des milliers de membres du BDP qui passent leur temps derrière les barreaux. Le but de cette répression de l’état turc est bien net ; briser la lutte du peuple kurde et empêcher la reconnaissance des droits politiques, sociaux et culturels de ce peuple. Donc, il est très urgent désormais de dénoncer ce caractère arbitraire et autoritaire de la manière dont le gouvernement turc gère la question kurde.
Je viens de savoir que l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) vient de demander des explications à Ankara concernant les dernières arrestations des journalistes. C’est une bonne nouvelle venant d’une instance internationale. Dans ces arrestations dénoncées par l’OSCE plus de 50 journalistes ont été arrêtés, surtout dans le dossier visant les milieux kurdes. Selon l’Association turque des Droits de l’Homme, en tous 71 journalistes sont actuellement détenus en Turquie.
Ahmet DERE  /  11.01.2012